LIMOGES (AFP), le 25-03-2004
Le chambre de l'instruction de la cour d'appel de Limoges a renvoyé jeudi la Cogema devant le tribunal correctionnel pour "pollution, abandon ou dépôt de déchets contenant des substances radioactives" en Haute-Vienne.

C'est une association locale, Sources et rivières du Limousin, qui avait porté plainte en 1999, en se fondant sur différentes analyses.

Le renvoi du leader mondial du cycle de combustible nucléaire devant un tribunal correctionnel pour pollution radioactive constitue une première en France.

La Cogema est soupçonnée d'avoir pollué plusieurs cours d'eau du département avec des éléments radioactifs, provenant de mines d'extraction d'uranium fermées, qui auraient formé des "déchets" en s'accumulant dans les sédiments.

Il lui est également reproché d'avoir contaminé les eaux du lac de Saint-Pardoux (Haute-Vienne) et certains de ses poissons: des analyses effectuées en 1998 ont en effet révélé une présence très forte d'uranium, de radium et de plomb dans une rivière, le Ritord, se jetant dans cette retenue d'eau.

"Des charges existent permettant de conclure à la gestion techniquement non-règlementaire des activités de la société Cogema", note l'arrêt de la cour d'appel. Elle pointe également l'"inertie" de la Direction régionale de l'industrie et de la recherche (Drire) qui "n'a pas exercé son pouvoir de contrôle de manière complète".

"C'est un immense sentiment de satisfaction car nous suivons le dossier depuis une dizaine d'années. Cette décision est importante dans un pays où le lobby du nucléaire est pesant", a affirmé le président de Sources et rivières du Limousin, Jean-Jacques Gouguet. "Cette affaire est une excellente occasion pour relancer le débat du nucléaire en France" et sur la "remise en état des sites".

Plusieurs études - réalisées entre 1993 et 2002 et commandées notamment par le conseil général de la Haute-Vienne, le conseil régional du Limousin et la Ddass - ont révélé que les sédiments des rivières et ruisseaux situés à proximité des mines d'uranium, ainsi que les boues du lac de Saint-Pardoux, avaient reçu des éléments radioactifs issus des eaux d'exhaure des anciennes mines.

Au terme de quatre ans d'instruction, le parquet de Limoges avait demandé un non-lieu général et, cas rare, fait appel du renvoi ordonné par le juge d'instruction en reprenant les arguments de l'entreprise sur le respect des normes et des règlementations en vigueur.

La Cogema, filiale d'Areva, a commencé l'exploitation des zones uranifères du Limousin en 1949. Les vingt-huit mines ont progressivement été fermées au début des années 90 et la dernière, la mine de Jouac, a cessé son activité en 2001.

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